
Mémoire DU d’histoire de la médecine 2017 Université Paris Descartes.
L’auteur est en cours de publication d’un livre en français et en anglais sur ce thème. Nous ne publions donc que les résumés. Nous vous en ferons part quand il sera édité.
Résumé
Le terme mélancolie apparaît pour la première fois au Ve siècle av. J.- C. en Grèce, dans le milieu médical : il naît de l’union de deux mots : mélas, noir, et kholè, bile, donc bile de couleur noire, pour désigner physiquement une humeur de l’organisme vivant. La bile noire est la seule des quatre humeurs ayant été valorisée, les autres étant trop matérielles pour avoir une transformation allégorique. La bile noire nous dit encore quelque chose de la mélancolie. Une sorte de sentiment de la théâtralité du monde, voilà comment on a parlé et parle encore du mélancolique : rythme intérieur ralenti du mélancolique, pour qui le monde va d’un mouvement trop fugace pour y prendre part. Le mélancolique est celui qui parle d’un vide interminable. Mélancolie donc comme paresse, manque de courage dans l’endurance de la souffrance et comme ‘instabilitas’, ‘inquiétude’. La mélancolie se situe dans une attente infinie et malheureuse. Un temps infini qui n’a pas la limite de la mort : quelle action pourra le remplir ? L’action a besoin de limites. La mort n’est pas la fin de la souffrance, mais c’est ce qui, quand cela arrive, nous livre encore plus à la souffrance. L’angoisse du mélancolique consiste à éprouver tout de coup l’impossibilité de la vie.
C’est en fait avec l’émergence de la psychanalyse, dans le dernier quart du XIXe siècle, que la mélancolie suscitera à nouveau un vif intérêt scientifique. Ainsi, elle sera décrite par Emil Kraepelin (1856-1926), dans sa première classification, comme une maladie curable ou comme phase d’une psychose maniaco-dépressive, pour ne figurer surtout que sous cette dernière définition dans ses classifications ultérieures.
La psychanalyse, la phénoménologie, l’anthropo-analyse, comme toute autre approche ont élargi les horizons de la psychiatrie. Ils l’ont rendu plus flexible et dynamique, l’ont libéré d’une systématisation nosographique trop souvent trop étroite, et l’ont poussé à prendre en compte, en plus des faits héréditaires et endogènes qui caractérisent l’atmosphère intérieure, aussi des facteurs et influences psychiques qui proviennent du monde extérieur, surtout du monde humain.
Mots clés : Mélancolie, bile noire, psychiatrie psychose maniaco-dépressive, l’impossibilité de la vie, psychanalyse, phénoménologie.
Summary
The term melancholy appeared for the first time in Greece around the 5th century B. C., in the medical milieu : it originated from the union of two words : "melays" (black) and "kholesters" (bile), therefore the color black of bile, to physically designate a mood of a living being. Black bile has been the only mood out of the four to be valorized, while the others were too material to have an allegorical transformation. It still tells us something about melancholy. A sort of feeling of the theatricality in the world, while taking a look at how we spoke and still speak of the melancholic : slowed inner rhythm of the melancholic, for whom the world moves too fast to take part in it. The melancholic is someone who speaks of an endless void. Melancholy, therefore, like laziness, lacks courage in the endurance of suffering and like ‘instability’ and ‘restlessness’. Melancholy lies in an infinite and unsuccessful expectation. An infinite time that is not limited by death : what action can fill it ? Actions needs limits. Death is not what puts an end to suffering, but it is, when it comes, what gives us even more suffering. The anguish of the melancholic consists of experiencing the impossibility of life all at once. It is indeed with the emergence of psychoanalysis, in the last quarter of the 19th century, that melancholy drew a great deal of scientific interest again. This is how it will later be described by Emil Kraepelin (1856-1926), first classifying it as a curable disease or as a phase of a manic-depressive psychosis, but only to include just this last definition in his later classifications.
Psychoanalysis, phenomenology, anthropogenic analysis, like other approaches, have broadened the horizons of psychiatry. They have made it more flexible and dynamic, free from a nosographic systematization often too narrow. They also have prompted it to take into account, in addition to the hereditary and endogenous factors that characterize the interior atmosphere, even the psychic factors and influences that come from the outside world, especially from the human one.
Keys words : melancholy, black bile, psychiatry, manic-depressive psychosis, the impossibility of life, psychoanalysis, phenomenology